Fiabilité des avis en ligne : vers une norme internationale ?

« Le bonheur est comme la réputation : peu de chose nous le procure, peu de chose nous le ravit » disait Simon de Bignancourt en 1755 dans ses Pensées et réflexions philosophiques.

Avec l’avènement du web 2.0, cette citation prend tout son sens à l’heure actuelle. La réputation des particuliers, comme des entreprises se joue sur internet, tant et si bien qu’on parle aujourd’hui de « e-réputation », de « réputation en ligne », ou encore de « cyber réputation ».

La réputation est l’opinion favorable ou défavorable qu’a le public pour quelqu’un ou quelque chose. Transposée au web, la réputation devient l’e-réputation.

La e-réputation, construite sur la base de jugements, opinions, croyances vient façonner l’image de marque des entreprises et influence directement son positionnement stratégique. A la différence de la réputation dans la vie réelle, qui ne résiste pas au temps qui passe, la réputation en ligne est quasi indélébile. Le critère du temps n’est pas applicable à l’internet, dont les informations sont archivées sans échelle de temps.

Des avis clients au service de l’e-réputation des entreprises ?

Cette réputation en ligne est désormais « liée à la digitalisation des comportements des consommateurs » rappelle Laurent Petit, président du comité technique ISO/TC 290 « réputation en ligne ».  Ce sont les clients qui façonnent l’identité numérique des entreprises, en partageant leurs avis et leurs expériences à propos d’un produit ou d’un service.

L’attractivité des entreprises repose aujourd’hui sur les avis des consommateurs. Selon une étude menée par Médiamétrie et les Orange Labs [2], 96% des internautes prêtent attention aux notes et avis et 89% les jugent comme utiles dans leur processus d’achat.

Face à ce constat et à la multiplication des sites d’avis (Yelp, Amazon, Tripadvisor,…) la maîtrise des outils est indispensable pour sauvegarder la e-réputation des entreprises.

Grâce à des avis positifs des consommateurs, les entreprises se taillent la part du lion. A l’inverse, le poids des avis négatifs peut avoir des retombées néfastes pour l’entreprise concernée. Les commentaires laissés par les clients sur leur achat d’un produit ou d’un service influence plus la décision d’achat que le discours officiel de l’entreprise. La réputation de l’entreprise passe désormais par la communication par le client pour le client.

EDIT – Mai 2015 :
Le magazine Businews parle ainsi de l’e-réputation comme « une arme à double tranchant » dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration. Quant aux stratégies à mener face à ce phénomène, Businews parle de nous ! Iprotego, une « arme fatale » contre une mauvaise e-réputation : L’é-reputation dicte sa loi, à lire ici

Faux avis en ligne : quelles infractions ?

Pourtant, selon une étude menée par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) [3] en date de juillet 2014, le taux d’infraction en matière d’avis de consommateurs sur internet, tous secteurs d’activité confondus, avoisine les 45% pour l’année 2013.

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En tête de liste des infractions en matière d’avis de consommateurs, la rédaction de faux avis : la rédaction de faux avis négatifs dirigés à l’attention de son concurrent ou bien la création d’avis positifs pour masquer les avis négatifs de sa clientèle. Une autre méthode consiste à supprimer tout simplement les avis négatifs concernant ses produits ou services.

Comment alors, parmi la multitude des contenus mis à disposition de l’internaute, différencier les vrais avis des faux avis ? Comment s’assurer de la sincérité des commentaires laissés par les internautes ?

Des sanctions à l’échelle internationale pour les faux avis en ligne

Face à certaines dérives, des sanctions au niveau international ont été prises : l’autorité de garantie de la concurrence et du marché (AGCM) a infligé à Trip Advisor une amende de 500 000 euros d’amende en décembre 2014. Certains commentaires étaient postés par des professionnels tandis que Trip Advisor affirmait que les commentaires émanaient tous de touristes.

Il convient alors de redonner confiance en l’internaute dans les avis en ligne. Tel est l’objectif du projet de normalisation AFNOR sur l’e-réputation des entreprises et des administrations.

Redonner confiance à l’internaute via la normalisation

Ce projet fait écho à la norme AFNOR NF Z74-501 du 4 juillet 2013 pour fiabiliser le traitement des avis en ligne de consommateurs, adoptée suite à un constat de méfiance selon lequel, ¾ des français pensent que parmi les avis de consommateurs, certains sont faux[4].

La norme NF Z74-501 offre des solutions transparentes aux sites souhaitant améliorer leur relation de confiance avec leurs clients. Du côté des internautes, il s’agit de leur donner plus de confiance dans leur navigation : pour exemple, des exigences de fraicheur des avis et de vérification de la preuve de consommation sont ainsi fixées par la norme.

Malheureusement, suite à la publication de la norme précitée, certains sites internet se sont auto-déclarés conformes à cette norme alors que les pratiques des entreprises ne l’étaient pas, vidant ainsi de sa substance la norme NF Z74-501.

Une nouvelle initiative de normalisation à l’échelle internationale

Face à ces pratiques déloyales et l’enlisement de la norme NF Z74-501, l’AFNOR a pris l’initiative de mener à bien un comité ISO sur l’e-réputation des entreprises et des administrations, comité ISO/TC 290, afin de redonner confiance à l’internaute dans les avis en ligne.

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Ce comité rassemble aujourd’hui des entreprises, des associations et des administrations de 28 pays : 9 ont le statut de participants actifs (Allemagne, Canada, Chine, Espagne, Finlande, France, Malaisie, Royaume-Uni et République Tchèque) ; 19 sont des observateurs, dont les Etats-Unis, le Brésil, le Japon et l’Inde.

En effet, avec l’ubiquité d’internet, les entreprises rencontrent les mêmes problèmes, quel que soit leur lien d’implantation. Il convient, à l’aide de ce comité, de mettre en commun les bonnes pratiques et diffuser le savoir-faire et de disposer des mêmes moyens partout au monde.

Comité technique international de normalisation « réputation en ligne » (ISO/TC 290) : quels objectifs ?

Le premier objectif est de définir une norme internationale sur le traitement des avis de consommateurs afin de s’assurer que les avis laissés par les internautes sont bien sincères, définir une méthode fiable de traitement, en d’autres termes. Mais le comité se mobilise sur d’autres sujets ambitieux qui vont au-delà du seul traitement des avis en ligne des consommateurs.

Au programme du comité ISO également, les pistes de réflexions sont les suivantes :

  • Elaborer un glossaire commun concernant l’e-réputation. L’objectif étant d’adopter une terminologie commune, au niveau international, sur la réputation en ligne. Il s’agit de s’accorder sur la définition de certains termes, par exemple qu’est-ce qu’un avis client : un avis de consommateur, un avis d’utilisateur, un avis d’acheteur ?
  • Etudier le rôle des médias sociaux concernant les débats de normalisation.

Projet ambitieux qui pourrait offrir un gage de confiance à l’internaute et plus de transparence dans les pratiques commerciales, notons cependant qu’il s’agit d’une norme d’application volontaire, qui à la différence d’une réglementation, est une méthode de référence élaborée à la demande et avec le concours actif des parties intéressées.

La prochaine réunion est prévue en octobre 2015 en Chine et la future norme ISO 20488 est attendue pour 2016, à suivre, donc…

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