Aujourd’hui, nous avons laissé la parole à Arnaud Diméglio, avocat au barreau de Montpellier avec qui nous travaillons régulièrement sur des questions juridiques.
La vidéo « anti-islam » et les caricatures de Mahomet relancent le débat juridique sur la question de la liberté d’expression et la protection des croyants.
En France, la liberté d’expression est protégée par la loi du 29 juillet 1881. Cette liberté n’est néanmoins pas absolue, et la dite loi prévoit certaines infractions, dont trois sont relatives à la religion.
Il existe, tout d’abord, l’infraction de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur appartenance à une religion déterminée. Cette infraction est sanctionnée par une peine d’un an d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende (article 24 de la loi de 1881).
La loi prévoit ensuite les infractions de diffamation et d’injure à l’égard des mêmes personnes. La sanction est respectivement d’un an d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende pour la diffamation, et de six mois d’emprisonnement et 22 500 euros d’amende pour l’injure (article 32 et 33 de la loi de 1881).
La religion constitue donc une circonstance qui aggrave la peine de ce type d’infractions laquelle est en principe de 12 000 euros d’amende. Il est rare que des condamnations soient néanmoins prononcées sur ces fondements.
La tendance est, en effet, à la liberté d’expression. Surtout lorsque les publications ont pour support des ouvrages ou des films. A titre d’exemple, le livre de Salman Rushdie intitulé « les versets sataniques » n’a pas été interdit. S’agissant des caricatures de Mahomet, en 2007, Charlie Hebdo n’a pas été condamné. De même, le film de Scorcèse « La dernière tentation du Christ » n’a pas été sanctionné. Les juges ont toutefois imposé l’insertion d’un carton d’avertissement, et ce afin de prévenir les spectateurs.
En revanche, les tribunaux peuvent être plus sévères lorsque l’atteinte est effectuée par voie d’affichage. En effet, dans ce cas là, l’atteinte s’impose à la vue de tous. Par exemple, dans l’affaire Ave Maria, l’affiche du film représentant une femme seins nus crucifiée a été interdite. Par contre, dans l’affaire Larry Flint, l’affiche du film n’a pas été sanctionnée.
Il est donc difficile de savoir quelle serait la position qu’aurait les magistrats quant à la vidéo « anti-islam » diffusée sur Internet. Le fait qu’elle soit diffusée par une plateforme d’hébergement du type Youtube, n’est pas en soi un obstacle : le célèbre hébergeur a déjà été, sur d’autres fondements, condamné. Et nous avons vu qu’il existe des infractions relative à la religion. Mais les tribunaux n’ont apparemment pas été saisis de ce cas. La question reste donc en suspens.
Arnaud Diméglio, avocat au barreau de Montpellier, spécialiste sur les sujets des NTIC.
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